BA 132

COLMAR - MEYENHEIM


ARCHIVES
FILMOGRAPHIE
MODELISME
LIENS

>><<
 

 

 

VIRAGES EN PERSIENNE

 

Alain BROSSIER

Bleu Ciel Editions
ISBN 9782952122894

264 pages

 

 

 

Dans Virages en persienne, Alain Brossier revient sur le parcours professionnel et militaire assez inhabituel qui est le sien. Comme il le dit lui-même : "Si cela vous intéresse, vous qui me lisez, tant mieux, mais je le fais d'abord pour moi". Pour lui et pour ses proches, indéniablement, ce qui explique que l'auteur ne prenne parfois pas la peine d'expliquer certaines références tout à fait abstraites pour le lecteur lambda, ou des surnoms et termes du jargon de Polytechnique, par exemple. Cette tendance va toutefois en s'amenuisant au fil des pages, et le souci de pédagogie finit cependant par prendre le dessus dans bien des cas. Alain Brossier s'est sans doute rappelé au fil de l'écriture que ses petits-enfant allaient faire partie de ses premiers lecteurs.

La lecture n'en est pas pour autant ardue, au contraire : rédigée en langage courant, cette biographie se lit agréablement et laisse transparaître la jovialité et parfois le caractère potache de l'auteur qui émet le souhait de l'épitaphe suivante: "Il s'est bien fendu la poire".

Après une rapide évocation de ses souvenirs d'enfance, où cet ancien élève de Polytechnique (l'X) voudrait presque se faire passer pour un cancre aux yeux de ses lecteurs, Alain Brossier en arrive rapidement à l'aviation, à commencer par ses souvenirs de l'école de l'Air (promotion 1956) après son passage à l'X. S'ensuit une formation chasse à Meknès (Maroc), qui fait tâter du T-33, puis du Vampire à l'auteur. Du Vampire au Mistral, il n'y a qu'un pas qui correspond à l'entrée en unité opérationnelle, en l'occurrence, l'EC 1/20 à Oran (Algérie). Au moment de sa première mutation, l'EC 2/20, qui était encore équipé de P-47, aurait bien tenté le jeune pilote, en lui permettant de rester à Oran. Il doit cependant prendre la direction de Colmar, pour devenir "fouille-merde" (surnom des pilotes d'unités de chasse tout-temps, dont la spécialité consistait à voler dans les nuages, ou de nuit, bref, sans visibilité) au sein de la 13e Escadre de Chasse Tout-Temps (13e ECTT), équipée de F-86K Sabre. C'est surtout cette période qui nous intéresse ici, dans le cadre interallié du 1er CATAC et de l'OTAN.

Il est dommage que l'auteur ne jalonne pas davantage son récit de dates précises. On arrive tout de même à déduire qu'Alain Brossier arrive à Colmar vers 1958, en plein règne du F-86K Sabre. De sa mission de pilote de chasse tout-temps, assurant la permanence opérationnelle (PO) en bout de piste, à ses fonctions d'officier NBC (Nucléaire Bactériologique Chimique) - guerre froide oblige - en passant par les exercices Rebecca, les campagnes de tir et les occasionnels desserrements à Belfort-Fontaine, Alain Brossier nous retrace ce qu'était la vie d'une escadre d'interception en première ligne, face à la menace soviétique à la fin des années cinquante et au début des années soixante.

L'auteur revient notamment sur sa monture, le F-86K, et le confort de sa cabine, la lisibilité de son tableau de bord, et les performances de ce chasseur tout temps qui se riait de la neige et du givrage tant il était bien pensé et performant pour son époque. Il était même prévu que cet intercepteur puisse chausser des pneus à clous pour opérer même en cas de verglas! Equipé de post-combustion et d'un pilote automatique, la maîtrise de cet apareil par ses pilotes était en outre facilitée par la présence à la "13" d'un simulateur en tous points égal au cockpit de l'appareil, et qui permettait aux cochers de simuler de nombreuses pannes pour être aguerris à toutes sortes de situations, une fois en l'air. Cet outil et la pédagogie qui en découlait étaient d'une réelle modernité au sein de l'armée de l'air, à la fin des années cinquante! C'est sur F-86K que l'auteur expérimente la première des trois éjections de sa carrière, à une époque où les crashes n'étaient pas rares. Il faut dire qu'il y avait "de la ferraille en l'air" puisque le samedi était encore un jour travaillé dans l'armée de l'air, et que même le dimanche, pour rompre la monotonie de la PO, les pilotes faisaient systématiquement un vol, à des fins d'entraînement. Pour les pilotes, il fallait être en l'air en moins de cinq minutes! Alain Brossier nous dévoile les coulisses de cette PO, où pilotes et mécanos cohabitaient avec un sanglier, Nénesse, la mascotte de l'unité!

Le témoignage d'Alain Brossier sur l'arrivée du Mirage III à la "13" s'avère aussi très intéressant : "Nous avons bien regretté nos confortables F-86, sans doute un peu poussifs, mais beaucoup moins fragiles que le Mirage, au début, du moins". L'escadre colmarienne fut en effet la seconde à toucher ce nouvel intercepteur bi-sonique, après la "2" de Dijon. Pourtant, la "13" ne fut pas à l'abri des même déboires que la 2e EC, liés à la mise en service d'un tout nouvel appareil, pouvant se révéler fragile et disposant de peu de pièces de rechange. Une vraie désillusion après avoir tâté d'une mécanique américaine robuste et bien huilée, ayant fait ses preuves...
Avec l'arrivée du Mirage III, la PO, jusque la uniquement diurne, devint H24. Les pilotes bénéficièrent d'installations en dur en bout de piste pour assurer leurs astreintes, même si les hangars étaient avant tout destinés à préserver des intempéries les précieux avions plus que leurs pilotes... L'auteur mentionne aussi les "dogfights" qui étaient légion, en particulier avec les pilotes canadiens, de Baden-Söllingen qui avaient souvent l'avantage à l'époque du F-86K, probablement moins à partir de l'arrivée du Mirage III.

Alain Brossier poursuit son récit à travers ses expériences de pilote d'essai au Centre d'Essais en Vol (CEV) à Brétigny puis Istres, un peu plus techniques à suivre pour le lecteur, mais tout aussi intéressantes. Davantage, sans doute que son passage en Etat-Major et son expérience mitigée de directeur du Musée de l'air et de l'Espace, mais qui font également partie de la destinée d'un officier de carrière. Avant cela, l'auteur aura eu l'occasion d'effectuer un nouveau passage à la "13" à Colmar au début des années soixante-dix, puis à nouveau au CEV, à Cazaux cette fois. Ce récit se clôt avec l'engagement associatif, au sein de SOS Amitié, de ce Général de Brigade Aérienne en retraite, mais toujours désireux de s'investir et de servir.

Il convient de préciser que nombre d'anecdotes et de souvenir opérationnels complémentaires d'Alain Brossier sont également rapportés par Christophe Gazstych dans son livre Sabre sur l'Alsace.

Cette prose pleine de calembours est d'autant plus agréable et facile à lire qu'elle est agrémentée, au fil du texte, de photos en noir et blanc. Ces illustrations sont complétées par un cahier central de huit pages proposant des photos couleur, imprimées sur un papier couché. Malheureusement, une relecture attentive des épreuves a sans doute manqué, l'opus conservant de nombreuses fautes d'orthographe un peu dérangeantes, à force, mais qui n'enlèvent toutefois pas sa valeur à ce témoignage professionnel et personnel d'un pilote de chasse et d'essais à une époque charnière en matière de technologie aéronautique.

>> Lire la recension de l'Aérobibliothèque


4e de couverture de Virage en persienne, d'Alain Brossier.

 
 
 

CONTACT

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dernière mise à jour : 24/01/15

Haut de page

Copyright F. Loubette - 2013-2015